Bona retrouvée, un film de Lino Brocka
Présenté à la Quinzaine des Cinéastes au Festival de Cannes en 1981, et pour la première fois cette année en version restaurée, Bona de Lino Brocka marque le retour à Cannes Classics d’un film invisible depuis sa sortie. Dans les années 80, le cinéaste philippin avait par deux fois prétendu à la Palme d’or : en 1980 avec Jaguar, et en 1984 avec Bayan Ko.
Comme Insiang, Bona est en partie tourné dans un bidonville, décor récurrent chez le cinéaste, dont la filmographie sociologique et populaire traite généralement des classes moyennes philippines. Dans Bona, la jeune protagoniste abandonne ses études et ses parents pour suivre Gardo, un acteur de seconde zone dont elle s’est entichée. Ce dernier la tolère chez lui, à condition qu’elle supporte le défilé incessant de ses nombreuses conquêtes, et se plie à des travaux domestiques rabaissants. Malmenée de toutes parts, y compris par son père qui, excédé, la répudie, elle tente malgré tout de rester digne.
La protagoniste est incarnée par une superstar nationale : l’actrice et chanteuse Nora Aunor, également productrice du film. Cette dernière souhaitait faire évoluer sa carrière populaire vers davantage de films d’auteurs. Bona représente pour elle un curieux renversement de situation, dans lequel Lino Brocka désacralise son statut de vedette. Pour ce rôle dans lequel elle est presque muette, elle subit une situation humiliante sans jamais réagir ni se défendre. Le jeu de l’actrice est d’un grand dépouillement expressif, jusqu’au point de révolte final, magistral.
Une présentation de Kani Releasing et Carlotta Films. Nouvelle version restaurée en 4K par Kani Releasing et Carlotta Films au laboratoire Cité de Mémoire (Paris) à partir du négatif image et du négatif son 35mm d’origine conservés par LTC Patrimoine. La restauration son a été effectuée par L.E. DIAPASON. Sortie en salles en France par Carlotta Films le 25 septembre 2024. En présence de Vincent Paul-Boncour, directeur et co-fondateur de Carlotta Films.