Robot Dreams : entretien avec le réalisateur Pablo Berger
Chaque film de Pablo Berger est un exercice de style. Après Blancanieves et Abracadabra, le réalisateur espagnol se frotte à l’animation avec Robot Dreams, en Séance Spéciale. Adapté d’un roman graphique new-yorkais, le film se concentre sur l’amitié entre un chien et un robot de compagnie, avec tendresse et mélancolie.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’adapter ce roman graphique ?
Je n’avais jamais imaginé réaliser un film d’animation mais l’histoire du livre m’a marqué. Elle m’a fait rire et rêver. Elle m’a surpris et fait réfléchir sur l’amitié et sa fragilité, sur la manière de surmonter la fin d’une relation. L’âme de cette histoire m’a poussé à réaliser Robot Dreams.
New-York, c’est une ville que vous connaissez et qui vous a inspiré ?
J’ai vécu pendant dix ans à New-York, dans les années 1990, mais le film s’y déroule un peu avant, au milieu des années 1980. J’ai voulu retranscrire une ville d’un autre temps, qui n’existe plus, avant que la globalisation ne gomme toutes les spécificités de toutes les villes. Quand j’y vivais, New-York était unique. Sans doute la capitale du monde aux niveaux culturel et économique, l’endroit où il fallait être. Mon équipe a beaucoup travaillé sur ce projet, nous avons recherché des images, des photos et des films pour retranscrire le plus fidèlement possible le New-York d’alors, comme on l’aurait fait pour un film d’époque. On ne voulait pas que les new-yorkais y voient leur ville par le prisme d’un Espagnol, d’un Français ou d’un Japonais. C’était un défi.
Aucun de vos films ne ressemble à un autre. Comment abordez-vous l’exercice de l’animation ?
Ce qui m’a attiré, c’est le risque. Curieusement, dans tous mes films, j’ai eu recours au storyboard, élément fondamental dans la préparation d’un film d’animation. Je suis un réalisateur très patient, je travaille avec attention, ce qui est essentiel pour cet exercice. C’est comme si tous mes précédents films m’avaient préparé à la réalisation de celui-là. Ça n’a pas été un voyage dans le parfait inconnu car l’animation n’est pas un genre mais plutôt une autre manière de travailler.
Comme Blancanieves, Robot Dreams ne comporte aucun dialogue. L’exercice était tout aussi délicat ?
Ça a été plus dur car, dans Blancanieves, il y avait des intertitres qui donnaient des informations. Dans Robot Dreams, il y a du son direct. Les personnages rient, crient, respirent, on entend les portes se fermer… Là, il n’y a pas de texte en “joker”. C’était un défi mais finalement, dans mes précédents films, il y avait peu de dialogues. Les images parlaient. Me confronter à l’écriture en images est ce que je préfère dans le processus créatif et ça a été essentiel pour ce film.
C’est un film d’amitié pour enfants… et pour adultes ?
Mes films sont ouverts à tous les publics. Tout le monde doit pouvoir s’y confronter à son niveau. Pour les enfants, ce sera une histoire d’amour ou d’amitié. Un adulte y verra un film sur le couple ou peut-être sur la perte d’un être cher. C’est très ouvert. Le fait de ne pas utiliser de dialogue aide le spectateur à s’approprier le film selon son vécu.