Black Dog (Gou Zhen), le regard de Guan Hu
Dans Black Dog (Gou Zhen), son nouveau long métrage présenté au Certain Regard, le cinéaste chinois Guan Hu narre l’histoire de Lang, un agent communal charger d’évacuer les chiens errants de sa ville natale sur ordre du gouvernement. L’occasion pour le réalisateur de filmer le quotidien des laissés pour compte du développement industriel qui propulse l’économie du pays.
Qu’est-ce qui vous a incité à travailler sur ce film ?
Je vis en Chine et j’ai vécu de près l’énorme développement de mon pays au cours des dernières décennies. J’ai toujours été curieux de savoir à quoi ressemblait la vie des gens en dehors des grandes villes et dans les régions plus reculées de la Chine pendant cette période de développement rapide. Il y a forcément des gens qui ont été laissés pour compte ou mis de côté au cours de ce processus. Je me suis demandé quelle force leur permet de continuer et de survivre. Ce sont mes réflexions sur ces personnes qui m’ont incité à travailler sur ce film.
Quelle a été votre méthode de travail ?
Il y a beaucoup d’animaux dans le film : des chiens, des tigres et des loups… Nous avons dû faire de nombreuses recherches pour nous assurer qu’ils pouvaient travailler avec les acteurs de manière harmonieuse. Cela a demandé de la patience. Par chance, le destin nous a donné le coup de pouce dont nous avions besoin. Pour une scène, je voulais que le tigre montre à Lang où se cachait le chien noir. Bien sûr, à l’époque, cela semblait impossible à réaliser. Mais au moment où nous commencions à être à court d’idées, l’animal, un tigre mandchou, s’est levé de lui-même et a grogné doucement en direction de l’endroit où se cachait le chien. L’acteur jouant Lang a également regardé par-dessus son épaule dans cette direction et a trouvé le chien. Même si nous ne pouvions pas communiquer avec les animaux par le langage, nous sentions qu’ils commençaient à nous comprendre.
Un mot sur vos acteurs ?
Les acteurs de Black Dog sont très expérimentés et connus de la plupart des spectateurs. Comme le film se concentre sur le désert de Gobi et les vastes étendues de la Chine occidentale plutôt que sur les grandes villes à la mode, nous voulions que les acteurs se fondent dans l’environnement et ressemblent à la population locale. Cela a été particulièrement difficile pour Eddie Peng, qui joue le rôle de Lang dans le film, parce qu’il a fait de la gymnastique, qu’il est grand et beau et qu’il a un sens aigu de la mode. Son image dans la vie est très différente du personnage que nous avions envisagé à l’origine. Afin de rapprocher l’acteur du personnage, nous avons dû modifier son physique, son teint et les traits de son visage, en gommant le style urbain qu’il dégage. Le résultat final est visible dans le film.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir réalisateur ?
Comme mes deux parents étaient acteurs, j’ai pratiquement grandi sur un plateau de cinéma. A l’endroit où ils travaillaient, il y avait régulièrement des projections, mais comme les billets étaient difficiles à obtenir, nous, les enfants, fabriquions nos propres faux billets pour entrer dans le cinéma et regarder les films que notre génération n’avait pas encore pu voir. Cette expérience de l’enfance est probablement ce qui m’a le plus influencé et le plus motivé. C’est l’oxygène qui nourrit mon développement créatif.