Boku No Ohisama (My Sunshine), le regard de Hiroshi Okuyama
A 28 ans, le cinéaste Hiroshi Okuyama aime placer les spectateurs à hauteur d’enfant, tout comme le réalisateur qu’il admire, Kore-eda, membre du Jury des Longs Métrages cette année. Six ans après Jesus, son premier film, il crée avec My Sunshine un surprenant duo de patineurs artistiques nourri de ses propres souvenirs, et présenté au Certain Regard.
Racontez-nous la genèse de votre film.
J’avais envie de faire un film sur le patinage artistique, que j’avais pratiqué étant enfant, mais je n’y arrivais pas. J’ai dû me résoudre à admettre qu’évoquer des souvenirs ne suffit pas à faire un film. Puis j’ai découvert la chanson « My Sunshine » de Humbert Humbert et, en l’écoutant tous les jours, l’histoire que je devais filmer a commencé à prendre vie. Au même moment, j’ai fait la connaissance de Sosuke Ikematsu et j‘ai eu la conviction que, si j’arrivais à retranscrire à l’écran le charme de ce comédien, je pourrais faire le film.
L’atmosphère du tournage ?
Pour moi, faire un film, c’est non seulement le réaliser, mais aussi l’écrire, le tourner et le monter. Ce qui signifie que, sur le plateau, je regarde les acteurs jouer, puis je modifie le scénario et, tout en imaginant le montage, j’endosse le rôle de directeur de la photographie. En plus, pour ce film, j’ai chaussé les patins pour certaines scènes que je tournais. A faire tout cela en même temps, j’ai parfois craqué et, à chaque fois, Sosuke Ikematsu, qui jouait le rôle principal, m’a aidé comme s’il était lui aussi réalisateur.
Quelques mots sur vos interprètes ?
Pour les rôles de Takuya et de Sakura, j’ai choisi des jeunes qui savaient patiner. Comme ils n’avaient pas d’expérience en tant qu’acteurs, je ne leur ai pas donné le scénario. Pour les dialogues, je leur ai fourni le strict minimum et demandé d’interpréter le reste librement. Pour le rôle de l’entraîneur Arakawa, j’ai choisi Sosuke Ikematsu que j’avais rencontré lors du tournage du film institutionnel que j’ai réalisé pour la marque Hermès. Lorsque j’ai vu ce qu’il dégageait, j’ai décidé que j’allais écrire le rôle pour lui.
« J’ai appris que toute expérience pouvait faire un film. »
Que vous a appris la réalisation de ce film ?
J’ai appris que toute expérience pouvait faire un film. Par hasard, j’ai appris le patinage artistique quand j’étais enfant et j’en ai fait un film. D’autre part, depuis toujours, je souffre d’un tic qui me pousse à me racler la gorge. Mes amis se moquaient de moi et j’en ai souffert. Cette expérience m’a conduit à imaginer le protagoniste atteint de bégaiements.
Qu’aimeriez-vous que l’on retienne de votre film ?
J’espère que chaque spectateur, en empathie avec les sentiments de Takuya et de Sakura, pourra se remémorer des souvenirs d’enfance oubliés et des sentiments alors éprouvés.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir réalisateur ?
C’est la conjonction de plusieurs évènements. Mais après avoir réalisé mon premier film, j’ai eu la certitude que ma vie serait dédiée au cinéma jusqu’à ma mort. Lors de ma participation au Festival de Stockholm, j’ai visité le studio de Roy Andersson. Je l’ai vu et il m’a très gentiment parlé de la façon dont il envisage la création. J’ai alors pensé que je souhaitais avancer dans la vie en me consacrant à la réalisation de films avec autant de conviction que lui.